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Le blog d'un véto - Page 2

  • Fontenelle : "la dent d'or"

    "Il serait difficile de rendre raison des histoires et des oracles que nous avons rapportés, sans avoir recours aux Démons, mais aussi tout cela est-il bien vrai ? Assurons nous bien du fait, avant de nous inquiéter de la cause. Il est vrai que cette méthode est bien lente pour la plupart des gens, qui courent naturellement à la cause, et passent par-dessus la vérité du fait; mais enfin nous éviterons le ridicule d'avoir trouvé la cause de ce qui n'est point.
    Ce malheur arriva si plaisamment sur la fin du siècle passé à quelques savants d'Allemagne, que je ne puis m'empêcher d'en parler ici.
    En 1593, le bruit courut que les dents étant tombées à un enfant de Silésie, âgé de sept ans, il lui en était venu une d'or, à la place d'une de ses grosses dents. Horatius, professeur en médecine à l'université de Helmstad, écrivit, en 1595, l'histoire de cette dent, et prétendit qu'elle était en partie naturelle, en partie miraculeuse, et qu'elle avait été envoyée de Dieu à cet enfant pour consoler les chrétiens affligés par les Turcs. Figurez vous quelle consolation, et quel rapport de cette dent aux chrétiens, et aux Turcs. En la même année, afin que cette dent d'or ne manquât pas d'historiens, Rullandus en écrit encore l'histoire. Deux ans après, Ingolsteterus, autre savant, écrit contre le sentiment que Rullandus avait de la dent d'or, et Rullandus fait aussitôt une belle et docte réplique. Un autre grand homme, nommé Libavius, ramasse tout ce qui avait été dit sur la dent, et y ajoute son sentiment particulier. Il ne manquait autre chose à tant de beaux ouvrages, sinon qu'il fût vrai que la dent était d'or. Quand un orfèvre l'eût examinée, il se trouva que c'était une feuille d'or appliquée à la dent avec beaucoup d'adresse; mais on commença par faire des livres, et puis on consulta l'orfèvre.
    Rien n'est plus naturel que d'en faire autant sur toutes sortes de matières. Je ne suis pas si convaincu de notre ignorance par les choses qui sont, et dont la raison nous est inconnue, que par celles qui ne sont point, et dont nous trouvons la raison. Cela veut dire que non seulement nous n'avons pas les principes qui mènent au vrai, mais que nous en avons d'autres qui s'accommodent très bien avec le faux."

  • Le véto et les éleveurs.

    J'ai  été contacté pour participer à une émission télévisée : "Je n'ai pas d'éleveur de chiens dans ma clientèle et je ne déprime pas"...

    On rigole, on rigole, mais un jour... allez savoir, on y viendra.

    Je parcours parfois des sites ou des forums destinés aux aficionados canins. Races de ceci, race de cela. Plus de 350 races à vue de nez.

    Les relations éleveurs-vétos sont souvent passionnelles et enflammées. Avec un savant mélange de compétence et d'empirisme d'un coté, et de méfiance et de technologie de l'autre (choisissez votre camp). Au milieu : l'argent. Le flouz, le blé, le pognon, la thune. Avec les fameux tarifs éleveurs. Régulièrement on me demande : "Vous faites un tarif éleveur". Après tout, pourquoi pas. Lorsqu'on a une portée de 6 chiots par an à vacciner/identifier, plus la visite d'élevage, plus les dépistages de tares, plus les frottis, plus les échos, plus la césarienne, plus l'insémination... on peut se permettre un geste. Le vaccin est bradé, la consultation est tarifairement adaptée. Si cela empêche l'éleveur d'aller voir le concurrent, n'hésitons pas... -10% ? pas assez. -20% ? insuffisant. Gratuit ? ah, mieux. Quant au coût horaire, 8,50€/h... ça vous va ? Gageons qu'avec la Directive Service (oui, je sais, je suis lourd !) les offres vont bientôt fleurir.

    On s'aperçoit au travers de ces forums que le véto est jugé sur des critères parfois exagérés, parfois insignifiants, parfois logiques. Force est de constater que le décalage entre la pensée d'un éleveur et celui d'un véto est important.

    Certes le véto est "LE" professionnel qui doit tout savoir. Mais si on multiplie le nombre de races par le nombre d'affections héréditaires (par exemple), on s'aperçoit rapidement qu'il est impossbile, en dehors de toute spécialité, de connaitre par coeur les tenants et les aboutissants de chaque pathologie. Alors, fatalement, quand au cours d'une consultation vaccinale on me parle de l'anomalie de Pelger-Huet chez le Braque de Weimar, ou de la dyschondrostéose du Samoyède, je suis obligé d'aller voir dans les bouquins.

  • Qu'ouïe-je, courge ?

    On ne me l'avait pas encore faite : "Mon chat a du ténia, mais cela m'étonne quand même car je lui ai donné de la courge". Autant dire que le segment qui gigotait sous la queue n'a pas du être beaucoup en contact avec la cucurbitine sensée débarrasser Minou de ces parasites. "Mais comme il en a encore, je me suis dit que j'allais devoir passer au chimique". Je vous jure que c'est ce qu'on m'a dit (sinon cela n'aurait aucun intérêt).

    Plusieurs choses. On peut vermifuger avec du chimique, si le chat chasse beaucoup, il faudra le traiter tous les trois mois malgré tout. Ensuite, par curiosité, je suis tout de même allé sur Google pour me renseigner quant à l'efficacité de ce remède.

    Mode d'emploi :

    Comme tænifuge, prenez 200 g (50 à 100 g seulement chez l'enfant selon le poids) de graines entières
    - avec ou sans leur enveloppe - à hacher finement, puis à piler longuement dans un mortier avant de
    mélanger à un poids égal de miel. Prenez cette préparation le matin à jeun, en trois fractions égales que
    vous absorberez à 30 minutes d'intervalle, la dernière prise étant suivie trois heures après par une purge
    (30 g d'huile de ricin par exemple). L'absence d'anneaux dans les selles au bout de 3 mois signe l'expulsion
    définitive du tænia.
    En cas d'échec (constatée par la réapparition d'anneaux dans les selles dans ce laps de temps de 3 mois),
    recommencez ce même traitement avec seulement 100 g (25 à 50 g chez l'enfant) de graines de courge
    mais trois jours de suite, seule la dernière prise du 3ème jour étant suivie trois heures après par une
    purge comme ci-dessus. 
    L'avantage majeur de ce traitement naturel est qu'il est absolument sans dangersans aucun effet
    secondaire et qu'il peut même être prescrit chez les jeunes enfants, tout en étant agréable à 
    prendre.

    Je souhaite beaucoup de courage pour appliquer cette méthode sur un chat tous les trois mois.

    Traitement sans danger. Admettons... après tout, on mange bien du potiron et on ne s'en porte pas plus mal.

    Sans effet secondaire. Ben.. si, justement... l'effet secondaire issu de la purge, quand même !

    On peut aussi revenir sur la notion de chimique. A partir du moment où une molécule intervient, c'est justement chimique. Voire biochimique lorsque cela se passe dans un organisme vivant. Courge ou pas courge.

    Revenons aussi sur plusieurs points.

    Ce qui est naturel, provenant directement de la nature, n'est pas forcemment sans danger. L'if à baie en est un bon exemple et bon nombres de bovins en ont fait la fatale expérience. On pourrait aussi évoquer l'ammanite phalloïde ou la cigüe. L'acide acétyl salicylique vient bien du saule, mais on sait qu'au delà d'une certaine dose, cela devient hépato toxique. C'est naturel donc c'est bon, n'est pas une règle absolue.

    Le chat et le chiens n'ont pas le même métabolisme que l'humain. L'oignon en est un exemple : ses cristaux d'oxalate ne font pas bon ménage avec les reins de nos carnivores domestiques.

    Le mythe du traitement sans effet secondaire a la vie dure. L'homéopathie fonde sa réputation sur cet argument. On peut d'ailleurs se demander pourquoi il n'y a pas d'effet secondaire. Mais à partir du moment où une molécule interagit avec un organisme, il y a fatalement des effets secondaires (je n'aime pas cette affirmation péremptoire, mais difficile de résumer en une phrase les phénomènes de régulation d'un corps animal ou humain) . Effets parfois sans importance, parfois avec des répercussions désagréables répertoriées. La nature de chaque individu (humain ou animal) déterminera de façon quasi aléatoire ces perturbations (il existe par contre des spécificités d'individuelles connues, comme le colley).

    Alors, courge ou pas courge ? Les convictions de chacun (écologie, porte-monnaie, lobby anti pharmaceutique, mode de vie, ...) vont déterminer l'emploi de ces graines, mais pas leur réelle efficacité. Cela reste dans le domaine du remède de grand-mère - enfin, bon, nos grands mères sont tout de même nées après Pasteur et Flemming en général, arrêtons de les imaginer avec le chignon de mamie Nova.

    Bref, avant que je prescrive de la graine de courge sur un chat, il va me falloir quelques résultats probants avec des réponses claires à ces quelques questions :

     

    Comment l'expérience a-elle été conduite ?
    Était-ce une étude clinique ?
    Est-ce que c'était une étude (clinique) en double aveugle ?
    Y avait-il un groupe placebo, quelle était la substance utilisée ?
    Peut-on imputer el résultat à un effet placebo ?
    Y avait-il un groupe contrôle ?
    Comment est-il constitué ?

    Quelle est la taille de l'échantillon testé?

    Les groupes ont-ils été constitués au hasard ?
    l'étude a-t-elle été publiée dans un journal reconnu par la communauté scientifique avec un comité de lecture ?
    A-t-on des résultats de corrélation ou de causalité ?
    Quelle était la durée de l'étude ?
    l'étude a-t-elle été reproduite par d'autres chercheurs avec les mêmes résultats ?
    La différence entre les groupes de l'étude étaient-ils statistiquement significatifs ?
    Quel degré de certitude a-t-il été utilisé ?
    Qui étaient les scientifiques ?
    Qui a fourni la subvention à l'étude ?

    Courgez bien.